CORIO Bernardino, L’Historia Di Milano, Venise, Giorgio de’Cavalli, 1565.
In-4°, italien.
Localisation : Collection privée.
Au n° 26 du catalogue de la vente Binoche et Giquello du 7 décembre 2021, un exemplaire jusqu’ici inconnu des spécialistes porte la signature bien reconnaissable de Montaigne au bas de la page de titre. Cette troisième édition, augmentée, de l’Historia di Milano (la seconde vénitienne), « dall’eccellentiss. oratore M. Bernardino Corio gentil’huomo Milanese », embrasse « deux mille cent ans d’histoire de la cité et de l’Italie tout entière ».
L’histoire de Milan proprement dite a été organisée en sept parties par Bernardino Corio (1459-vers 1519), orateur renommé et premier écrivain italien à avoir écrit l’histoire de son pays en langue vulgaire, à la demande expresse du duc de Milan, son protecteur et mécène, le célèbre Ludovic Sforza, dit le More. Dès 1503, date de l’édition originale, l’auteur avait joint à cette relation un récit des « Vies des empereurs depuis Jules César jusqu’à Frédéric Barberousse », que l’éditeur de 1565, Thomaso Porcacchi (vers 1530-1585), conserve tout en prolongeant la relation des faits de 1499 à 1535. Il amende et même modifie parfois le texte, qu’il accompagne de sommaires dans la marge. Outre huit pages de pièces liminaires et trente pages de « table » non numérotées, le volume comprend 1262 pages. La reliure de l’exemplaire en vente date du milieu du XIXe siècle.
Il ne semble pas que Montaigne ait fait usage de cette Histoire de Milan. L’a-t-il seulement lue ou consultée ? Lorsque par deux fois dans ses Essais il fait mention des Sforza, qu’il appelle « Sforce », c’est en puisant dans deux lectures, elles avérées, et par lui-même à la fin du chapitre « Des livres » : Guichardin et les frères Du Bellay. Le premier lui a appris la misérable fin du grand duc dans une prison française après sa capture par le roi Louis XII : « du temps de nos pères ce Ludovic Sforce dixième Duc de Milan, sous qui avait si longtemps branlé toute l’Italie, on l’a vu mourir prisonnier à Loches : mais après y avoir vécu dix ans, qui est le pis de son marché » (sept ans en fait, de 1500 à 1507, donc après le terminus ad quem de l’Histoire de Corio). Des deux frères, il tient une longue anecdote sur un ambassadeur du duc François II (fils et successeur de Ludovic), qui s’était « coupé » en présence du roi François Ier, bien qu’il fût « homme très fameux en science de parlerie ». Le duc était alors, précise Montaigne, en instance de mariage avec une princesse de Danemark qui allait, une fois veuve, devenir en nouvelles noces duchesse de Lorraine et de Bar (« elle est à présent douairière de Lorraine »).
Avec cet exemplaire, le nombre de livres italiens rescapés de la « librairie » de Montaigne est porté à dix-neuf. Mon étude comparative des paraphes placés après un numéro d’inventaire dans le coin supérieur droit des pages de titre permet d’assurer désormais que cinq volumes ont une même provenance, pour l’instant non identifiée : outre Corio, Bacci, Castanheda, César de 1575 (exemplaire de Périgueux ainsi confirmé) et Horace. Soit trois ouvrages en italien, un en espagnol et un en latin. Un montage permet, ci-dessous, de comparer les cinq marques de la même main (de haut en bas, Bacci, Cesare, Corio, Castanheda, Horatius).
Alain Legros
30 novembre 2021
Comparaison des cinq marques de la même main Bacci, Cesare, Corio, Castanheda, Horatius : même provenance. Montage : A. Legros – BVH |
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Bacci | |
Cesare | |
Corio | |
Castanheda | |
Horatius |
Exemplaire équivalent de l’édition de 1565
– Autre exemplaire numérisé (en ligne sur Internet Archive, National Central Library of Rome)